Rappel : droits économiques,sociaux,culturels, de quoi s'agit-il ?

Publié le 26 Septembre 2007

  Droits économiques sociaux et culturels

Les droits économiques, sociaux et culturels sont souvent considérés comme "des droits de seconde génération" non justiciables. Au regard du droit international des droits de l'homme et de son application dans les différents pays, les droits civils et politiques ont été l'objet d'une plus grande attention ; ils ont été codifiés et interprétés par la jurisprudence. Ils ont été l'objet d'une plus grande prise de conscience. Considérés comme revêtant un caractère de plus grande urgence, les droits civils et politiques ont constitué une priorité dans les activités des Nations unies.

Cette perspective va cependant à l'encontre des principes fondamentaux d'indivisibilité et d'interdépendance entre les droits civils et politiques et les droits économiques sociaux et culturels affirmés dans la Déclaration universelle des droits de l'homme et réaffirmés lors de la Conférence mondiale de Vienne sur les droits de l'homme de 1993.

Parmi tous les instruments généraux de protection des droits de l'homme, le Pacte sur les droits économiques, sociaux et culturels (le PIDESC) constitue le cadre juridique le plus important en matière de protection de ces droits élémentaires. Créé en 1985, le Comité des droits économiques, sociaux et culturels (CDESC) a pour tâche de contrôler la conformité des législations des Etats parties avec les dispositions du Pacte. A cette fin, le Comité élabore des commentaires généraux qui constituent des interprétations ayant autorité en ce qui concerne la mise en œuvre des dispositions du Pacte.

Les dispositions internationales les plus significatives en matière de droits économiques sociaux et culturels sont contenues dans le Pacte. On y trouve notamment le droit à un niveau de vie convenable (qui inclut le droit à un logement et à une alimentation convenables), le droit à la santé, le droit à l'éducation. Le droit de mener une vie digne ne peut être mis en œuvre que si les besoins élémentaires de la vie que sont le travail, la nourriture, le logement, la santé, l'éducation et la culture sont suffisants et équitablement accessibles à chacun. L'accès à la nourriture, aux premiers soins et à l'éducation est fondamental pour que puisse être implanté le droit au développement et que diminue la pauvreté. En effet, l'accroissement de la pauvreté n'est souvent que le corollaire d'abus existants dans le domaine des droits économiques sociaux et culturels.

Les Nations unies se sont engagées dans diverses activités en se fixant pour objectif de développer la promotion et la protection des droits de l'homme. La Commission des droits de l'homme et la Sous commission de promotion et de protection des droits de l'homme ont élargi leurs centres d'intérêts aux droits économiques, sociaux et culturels et, pour ce faire, se sont efforcées de promouvoir la mise en œuvre de mécanismes de contrôle extra-conventionnels qui permettent, à certaines conditions, d'opérer des contrôles en cas de violation.Up

La désignation de rapporteurs spéciaux sur le droit à l'éducation, le droit à l'alimentation, le droit à un logement convenable, le droit à la santé, ainsi que la désignation d'un expert indépendant chargé d'examiner le projet de protocole facultatif au PIDESC constituent des efforts bienvenus en vue de mettre en oeuvre les droits économiques, sociaux et culturels dans les différents pays.

Conformément à leurs mandats, ces rapporteurs spéciaux soumettent régulièrement leur rapport sur l'évolution des droits économiques, sociaux et culturels à la Commission des droits de l'homme. Dans l'exercice de leur mandat, ils sont en effet confrontés à des problèmes majeurs dont les principaux vont être abordés ci-dessous.

LES PRIORITES DE LA COMMUNAUTE INTERNATIONALE

Le droit à un logement convenable

Dans sa résolution 2000/9, la Commission a désigné en septembre 2000 un Rapporteur spécial (titre du mandat) pour une période de trois ans. Son mandat était centré sur le droit "à un logement convenable en tant que composante du droit à un niveau standard de vie" : Miloon Khotari (Inde).

Dans son troisième rapport, qui intervient à la fin de son mandat de trois ans, le Rapporteur spécial réitère que le droit à un logement convenable ne peut être entièrement réalisé s'il est pris séparément des autres droits de l'homme. Il reconnaît que depuis le début de son mandat les gouvernements, les Nations unies, les différentes institutions internationales, ainsi que les organisations non gouvernementales ont consenti des efforts accrus et l'ont aidé dans son travail de manière non négligeable. En effet, différents Etats ont introduit ce droit dans leur constitution, ce qui représente une avancée importante.

Dans son dernier rapport, Miloon Khotari a mis l'accent sur quatre questions urgentes : le droit à l'eau et les questions sanitaires ; les réponses locales au processus de globalisation dans le développement rural et urbain ; le besoin d'indicateurs de base et d'outils de contrôle pour une mise en œuvre plus efficace des objectifs de la Déclaration du Millénaire ; le droit à un logement convenable des personnes souffrant d'incapacités.Up

En ce qui concerne l'importance de l'eau et des questions sanitaires, le rapporteur salue l'adoption par le CDESC, en novembre 2002, de son Commentaire général n°15, qui clarifie les obligations des Etats parties.

En vue de permettre au droit au logement de porter pleinement ses fruits, M. Kothari recommande aux Etats de tenir compte du contenu de ce Commentaire général dans le cadre des politiques de développement national et dans le cadre de la coopération et de l'assistance internationale, en prenant particulièrement en considération les individus vivant dans une extrême pauvreté.

Les objectifs contenus dans la Déclaration du Millénaire constituent d'importants repères pour la réalisation de ces droits. Le point essentiel de cette déclaration, qui concerne le droit au logement, est l'engagement de réduire de moitié d'ici 2015 le nombre des personnes ne jouissant pas d'un accès à l'eau potable, ce qui permettrait, d'ici à 2020, d'améliorer la vie d'au moins 100 millions de personnes habitant des bidonvilles. Le rapporteur souhaite dans ses travaux futurs mettre l'accent sur l'accès à un logement convenable des personnes souffrant d'incapacités. Selon le Commentaire Général No 4 relatif au droit à un logement convenable élaboré par le CDESC, il est prévu qu'un accès plein et entier doit être accordé aux personnes handicapées.

Dans l'exercice de son mandat, le rapporteur a accordé une attention particulière à la question du genre. Aux termes de sa résolution 2002/49, la Commission lui a demandé de soumettre lors de la cinquante neuvième cession, une étude sur les femmes et le droit à un logement convenable et plus particulièrement la question de l'égalité dans la propriété, de l'égal accès à la propriété et au contrôle des terres.

Le rapport mentionne l'instauration d'un dialogue entre le rapporteur et le Comité pour l'élimination des discriminations à l'égard des femmes (CEDEF), dans le but d'observer l'impact de la globalisation et de la privatisation des services sur l'accès des femmes au logement et aux droits civils, sur les violences domestiques, les expulsions forcées et sur les mesures résultant de discriminations positives.

En conclusion le rapporteur considère que le principe de non discrimination constitue un aspect clé de son mandat. Il souligne que des formes de discrimination et de ségrégation fondées sur la race, le genre, la catégorie sociale, le statut économique sont encore présentes en ce qui concerne l'accès au logement et aux services essentiels.Up

Le droit à la santé

Dans sa résolution 2002/31, la Commission a nommé pour une durée de trois ans, Paul Hunt (Nouvelle-Zélande), rapporteur spécial en ce qui concerne le droit à la santé.

La santé est un droit fondamental de l'homme et constitue un but élémentaire du développement durable. Le rapporteur souligne, à cet égard, "qu'une bonne santé n'est pas le résultat du développement : c'est un moyen d'y parvenir". La planification et l'exécution des premiers soins nécessitent à la fois des efforts individuels et collectifs pour veiller à ce que l'allocation des ressources soit faite de manière préférentielle aux personnes dans le besoin, tout en tendant à assurer la santé à tous.

Dans son rapport préliminaire, le rapporteur sur le droit à la santé présente les trois premiers objectifs de son mandat :
"promouvoir et encourager les autres à promouvoir le droit à la santé en tant que droit fondamental comme cela est affirmé dans de nombreux traités sur les droits de l'homme, dans les résolutions de la Commission des droits de l'homme et l'acte constitutif de l'Organisation mondiale de la santé (OMS)",
"clarifier le contour et le contenu du droit à la santé; identifier les bonnes pratiques pour rendre opérationnel le droit à la santé".

M. Hunt propose aussi d'incorporer ces objectifs dans deux thèmes en corrélation : le droit à la santé et la pauvreté, et le droit à la santé et à la non-discrimination.

Le second thème clef, à savoir le lien entre la discrimination et ses stigmates et le droit à la santé, est complexe.

Les droits des personnes souffrant d'incapacités, ou porteuses du VIH, ont néanmoins acquis une plus grande importance ces dernières années.

Le rapporteur a en outre identifié plusieurs questions qu'il souhaite voir examiner dans le cadre du droit à la santé à savoir : les stratégies visant à réduire la pauvreté, les maladies négligées, l'évaluation de l'impact de différents accords relevant de l'Organisation mondiale du commerce sur le droit à la santé, le droit à la santé mentale et le rôle de la santé professionnelle.

Il souligne que ce droit dépend de l'indépendance et de l'intégrité des professionnels de la santé qui, dans différents pays, sont victimes de discriminations, de détentions arbitraires ou de tortures. Face à ces difficultés, M. Hunt propose de contrôler et d'explorer le rôle indispensable joué par les professionnels de la santé dans la promotion et la protection des droits de l'homme et ce tant que des difficultés les empêchent de pratiquer.Up

Le droit à l'alimentation

En 2000, la Commission a nommé le Prof. Jean Ziegler (Suisse) rapporteur spécial sur la question du droit à l'alimentation. D'après les principales normes internationales et notamment le PIDESC, la faim doit être éliminée et tout le monde doit avoir accès à un approvisionnement alimentaire convenable, permanent et de qualité, afin de garantir la santé physique et mentale des individus et de la communauté et le respect de la dignité de la personne humaine.

Le commentaire Général n°12 sur le droit à une alimentation convenable inclut dans sa définition l'exigence qu'à tout moment toute personne puisse avoir un accès tant économique que physique à une alimentation convenable ainsi qu'aux moyens d'approvisionnement nécessaires.

Le Comité considère que ce droit implique la disponibilité de la nourriture en quantité et qualité suffisantes pour satisfaire les besoins de tout individu et l'accessibilité de cette nourriture. Le commentaire précise que le droit à l'alimentation n'implique pas une distribution de nourriture gratuite pour tous, mais les gouvernements doivent la protéger, la respecter, et la mettre en oeuvre.

Ce droit doit être garanti, même dans les cas de conflit armé. Le droit international humanitaire contient des dispositions qui le protègent, de même que les individus et les groupes qui prennent ou non part aux hostilités. Ainsi que le souligne le rapporteur dans son dernier rapport à la Commission, des efforts considérables doivent être entrepris pour s'assurer que le droit humanitaire est respecté et que les populations civiles sont à l'abri de la famine.

Dans son rapport, Jean Ziegler a en outre mis l'accent sur les questions relatives à : une alimentation convenable ; l'eau comme priorité élémentaire du développement, l'opposabilité de ce droit en justice, élément essentiel pour le développement ; le droit à l'alimentation pour les personnes souffrant d'incapacités, afin que des remèdes et une responsabilité puissent être trouvés en cas de violations ; le droit à l'alimentation dans le droit international humanitaire et dans le commerce international.

A ce sujet, le rapporteur a recommandé à la communauté internationale de revoir ses obligations commerciales internationales, afin d'éviter tout conflit entre le droit à l'alimentation et la sécurité alimentaire. Il salue deux initiatives : la première, tendant au développement par la FAO de lignes directrices sur le droit à l'alimentation et la seconde, relative à la rédaction d'un Commentaire Général No 15 sur le droit à l'eau.Up

Un groupe de travail intergouvernemental a d'ailleurs été mis en place en vue d'élaborer ces lignes de conduite.

Le rapporteur approuve également le fait que le CDESC a reconnu dans son Commentaire général que tant l'eau de consommation courante que l'eau d'irrigation sont des éléments clés du droit à l'alimentation.

Le droit à l'éducation

Les articles 13 et 14 du PIDESC reconnaissent que l'éducation est une condition fondamentale pour le respect des droits de l'homme et des libertés fondamentales. C'est pourquoi, aux termes de sa résolution 1998/33, la Commission a nommé Katarina Tomasevski (Croatie) rapporteur spécial sur le droit à l'éducation. Le mandat de ce rapporteur a ensuite été reconduit pour trois années supplémentaires par la résolution 2001/29.

Dans son cinquième rapport, le rapporteur accorde, comme au cours des années précédentes, la priorité à l'élimination progressive des obstacles à la réalisation du droit à l'éducation. Elle précise que beaucoup de progrès ont été réalisés par l'adoption d'engagements généraux pour la gratuité de l'école primaire et par un engagement international visant à constituer l'éducation en un nouveau droit de l'homme.

Mme Tomasevski s'intéresse particulièrement à l'élimination des obstacles à l'école primaire. Ces obstacles reflètent des discriminations fondées sur la pauvreté et l'âge. Le processus d'allègement de la dette a inscrit un engagement concret et significatif dont le but est d'accroître le financement de l'école primaire. Le rapport souligne que le droit à l'éducation implique trois catégories d'acteurs : les gouvernements, les enfants et leurs parents : "Le gouvernement en tant que prestataire et/ou source de financement, l'enfant en tant que principal titulaire du droit à l'éducation et du devoir de se conformer aux prescriptions concernant l'enseignement obligatoire et les parents de l'enfant qui sont les premiers éducateurs. La liberté garantie et son corollaire, la responsabilité qu'ont les parents de choisir l'enseignement dispensé à leurs enfants, constitue l'un des piliers du droit à l'éducation. La raison d'être de la liberté parentale est en fait d'empêcher l'Etat d'exercer un monopole sur l'éducation et de protéger le pluralisme".Up

L'une des principales idées du rapporteur est la durée de la scolarité ­ six ans à l'école primaire ­ spécialement en rapport avec l'élimination du travail des femmes. Mme Tomasevski recommande d'aligner l'âge maximum de l'école obligatoire avec l'âge minimum du travail pour que les enfants âgés de 12 ans ne puissent pas travailler.

Pour le rapporteur, la priorité doit être donnée à l'élimination des disparités entre les sexes : "Pour découvrir la raison de la disparité entre les sexes, il faut disposer de données qualitatives, concernant tout particulièrement les facteurs qui favorisent ou, au contraire, entravent l'exercice de tous les droits humains et qui exercent une influence sur tous les stéréotypes sexistes de l'enseignement et de l'apprentissage".

Enfin, il est important de préciser que le rapporteur révise ses conclusions en ce qui concerne la diminution du racisme par l'éducation. Les informations alarmantes sur l'augmentation du racisme dans l'Union Européenne, où le niveau d'éducation est élevé, montre en effet que l'éducation n'est pas un moyen de lutte contre le racisme.

VERS UNE PLUS GRANDE JUSTICIABILITE DES DROITS ECONOMIQUES, SOCIAUX ET CULTURELS

Par sa résolution 2001/30, la Commission a désigné un expert indépendant chargé du projet de protocole facultatif au Pacte sur les droits économiques, sociaux et culturels, Hatem Kotrane (Tunisie).

Le rapport remis à la Commission fait état de trois questions principales : la nature et les obligations des Etats parties au Pacte, la question de la justiciabilité de ces droits, la question des avantages et des possibilités que présente le mécanisme de plainte et la question de la complémentarité entre tous les mécanismes.

L'expert indépendant a souligné que les principales institutions responsables de la mise en oeuvre de ces droits sont les Etats, qui ont deux types d'obligations : les obligations de moyens et les obligations de résultats.

Par ce rapport, qui a mis en lumière une évolution de la manière dont la communauté internationale perçoit les droits économiques, sociaux et culturels, la Commission des droits de l'homme, lors de sa cinquante-neuvième session, a adopté un avant-projet de résolution dans laquelle elle confirme la décision de créer un groupe de travail sur l'opportunité d'élaborer un protocole facultatif au Pacte. Elle a demandé au groupe de travail de se réunir pour une période de travail de 10 jours, avant la soixantième session de la Commission. Cette initiative constitue un pas important sur la voie de la mise en oeuvre des droits économiques, sociaux et culturels.


source : http://www.aidh.org/ONU_GE/Comite_Drteco/comm_59sess.htm
Up

Rédigé par kak94

Publié dans #observatoirecitoyen

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